Rencontrez la délégation belge pour les Jeux Invictus ’22 : partie 3

Après un report de deux ans en raison de la pandémie de coronavirus, les Invictus Games 2020 (IG20) se dérouleront du 16 au 22 avril. Le champ de bataille de cette cinquième édition est La Haye, aux Pays-Bas. Pour la première fois, une délégation belge sera également présente. Au cours des dernières semaines, vous avez pu faire connaissance avec chacun de nos participants. Dans ce dernier article, nous vous présentons les quatre derniers participants qui donneront le meilleur d’eux-mêmes.

 

En plus de l’aviron, tous les quatre seront en action sur le vélo pour le contre-la-montre et le critérium. Les deux épreuves se dérouleront autour du parc des Jeux Invictus, où se trouve une piste cyclable de 2,5 kilomètres. Le parcours du contre-la-montre consiste en un tour, tandis que le critérium dure 30 minutes au total.  Vincent Binot, Raphaël Legros et Joeri Rousseau participeront avec un vélo de route. Didier Simons participera, lui, dans une autre catégorie avec un vélo à main.

 

Vincent Binot : toujours le même, mais plus lent

 

Vincent Binot est moniteur de sport à la Défense. Il a effectué cette fonction dans différentes unités et l’exerce encore aujourd’hui. En 2012, il avait dû recevoir cinq vaccins le même jour pour rester opérationnel lorsqu’une catastrophe le frappa.

 

« Trois jours après les vaccins, j’ai eu un coup de soleil en vacances et mes pieds ont énormément enflé », commence Vincent. Pendant six mois, sa situation s’est aggravée. Aucun médecin n’a été capable de trouver une véritable explication, tous spéculant sur les vaccins.

 

Dix ans plus tard, Vincent a du mal à se déplacer et est lent pour tout. Il déclare, ému : « Ce n’est pas comme une chute ou un accident. Vous êtes physiquement au sommet et soudain vous tombez.  Quand vous vous levez, vous ne savez pas ce que vous allez pouvoir faire ce jour-là. C’est dur mais j’ai dû l’accepter. Je suis toujours la même personne, mais je suis juste lent pour tout ».

 

Lorsque Bernard Bolly (moteur derrière la délégation belge IG20) a proposé à Vincent de faire partie de l’équipe, il n’a pas hésité un instant : « Ce projet va plus loin que ma personne. Malheureusement, il arrive que des personnes se blessent ou tombent malades en raison des risques liés à notre travail. Ces personnes ne sont-elles plus d’aucune utilité ? Nous sommes encore capables de beaucoup ».

 

Le sport a joué un rôle crucial dans la vie de Vincent, aussi bien aujourd’hui que dans le passé. C’est un moyen de récupérer plus rapidement et cela lui permet de garder le moral.  « Le sport devrait faire partie de la vie de chacun, qu’il soit valide ou invalide », affirme-t-il fermement. « Pour moi, ça a changé : avant, je m’entraînais pour gagner, maintenant je m’entraîne tous les jours pour m’améliorer. À La Haye, je donnerai tout ce que j’ai en moi ».

Raphaël Legros : Maintenant, je parle bien !

 

Le toujours joyeux Raphaël Legros venait de rejoindre le service des sports d’Eupen au moment de notre entretien. Auparavant, il travaillait à la piscine de Spa après une carrière au 12/13 Ligne. Un jour, en allant nager avec sa compagnie en 2014, il fut victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC).

 

Pendant plus de cinq mois, Raphaël est resté à l’hôpital où il suivait quotidiennement des séances de kinésithérapie. « J’ai également dû réapprendre à parler parce que j’étais aphasique », explique-t-il. « Maintenant, je parle bien », dit-il avec un grand sourire. Raphael a quitté l’hôpital avec un seul objectif : faire du vélo. Il a des priorités claires : « Ma famille est la chose la plus importante et ensuite vient le cyclisme ».

 

Raphaël s’est immédiatement porté candidat pour rejoindre la délégation belge des Invictus Games. Il complète également la New Generation Team de Ligue de Handisport Francophone de Wallonie qui participera aux Jeux Paralympiques de Paris. « Cela m’a poussé à faire encore plus de vélo pour m’améliorer de plus en plus », dit-il avec enthousiasme.

 

« L’équipe est comme une seconde famille pour moi. Nous nous comprenons et nous cherchons des solutions ensemble. Par ailleurs, nous évoluons tous dans la bonne direction. Maintenant, il nous faut encore quelques médailles », dit-il en riant à gorge déployée. « Même s’il n’y a pas de médailles, y participer est déjà exceptionnel. Je suis très reconnaissant à Bernard Bolly et à la Défense pour cela ».

Joeri Rousseau : deux types de douleurs

 

Joeri Rousseau travaille pour la Marine où il gère la maintenance des chasseurs de mines. « Les avantages de mon travail sont les horaires flexibles et le fait que je peux choisir quand m’asseoir ou rester debout. Idéal dans ma situation », explique-t-il.

 

Après plusieurs années de plaintes et de douleurs, on lui a diagnostiqué un rhumatisme en 2015, ce qui a eu un impact majeur sur la vie de Joeri. Ses membres étaient complètement raidis, ses articulations étaient complètement enflammées et certaines vertèbres étaient totalement usées, ce qui provoquait de fortes douleurs. « La maladie est constamment à l’affût. Je dois payer pour chaque « faux pas » pendant quinze jours. Je dois aussi compter sur beaucoup de médicaments pour pouvoir fonctionner », dit-il.

 

Joeri a eu besoin de temps pour accepter sa maladie. Ne plus pouvoir tout faire en tant que père a été la partie la plus difficile. « J’ai deux enfants qui adorent jouer au football, mais je ne devrais même pas essayer de taper dans un ballon. Sinon je serais de nouveau à plat pendant deux semaines ».

 

Il a dû développer plus de muscles pour s’assurer que ses articulations ne s’enflamment pas. Le vélo s’est avéré être le moyen le moins douloureux d’y parvenir : « Je peux difficilement me lever et marcher à cause de mes hanches, mais le vélo porte mon poids et je n’ai pas à les solliciter. C’est drôle, parce que je déteste le vélo ! », ajoute-t-il en riant. « J’ai deux types de douleurs maintenant. La mauvaise douleur, je la connaissais déjà, mais maintenant il y a aussi la douleur musculaire : la douleur du progrès ».

 

À l’approche des Invictus Games, il déclare : « Je ne serai pas le dernier et je ne serai jamais le premier, mais je vais montrer ce que j’ai dans le ventre ».

Didier Simons : chacun sa propre histoire

 

Didier était un jeune plongeur démineur de 25 ans pour la Marine lorsque la catastrophe a eu lieu.

En février 1989, un exercice de l’OTAN au large des côtes écossaises a mal tourné. « Je neutralisais une mine d’exercice quand elle m’a explosé dans les mains », commence Didier. L’eau froide lui a sauvé la vie. « J’ai perdu beaucoup de sang, mais grâce à l’eau froide, mon corps s’est mis en veille. Grâce à l’eau froide également, je portais une combinaison de plongée en néoprène épais qui a limité de nombreuses entailles ». Trois ans après l’accident, il a été mis à la retraite pour raisons médicales en raison de son inaptitude physique.

 

Les dommages corporels étaient considérables : Didier a perdu sa jambe gauche, a eu plusieurs blessures et des dommages auditifs aux deux oreilles. Pourtant, il n’a pas baissé les bras : « J’avais 25 ans. Je ne voulais pas seulement pouvoir remarcher le plus vite possible, mais aussi courir ». Quatre mois plus tard, il remportait son premier titre de champion de Belgique d’athlétisme.

 

« Le sport a toujours été essentiel pour moi. J’ai continué à m’entraîner dur pour pouvoir continuer à remporter des victoires », dit-il avec conviction. En 1992, Didier a été sélectionné pour les Jeux paralympiques de Barcelone. « En réponse à la retraite médicale, le virus du sport s’est vraiment réveillé en moi», dit-il en riant. « Un bon trait de caractère de tout militaire est la résilience. Eh bien, j’en ai montré ».

 

Didier, qui dirige désormais sa propre école de vélos à main, est heureux de représenter son pays aux IG20. « Nous nous y retrouvons chacun avec notre propre histoire. Une histoire qui n’est pas toujours facile, mais c’est notre histoire et elle fait de nous ce que nous sommes », conclut Didier.

Nathalie Mylle

Nathalie Mylle