Les griffes de Belgian Beast

Le Special Operations Regiment (SOR) revient après plus d’un an d’absence dans la ville américaine de Yuma pour l’exercice Tactical Air Insertion (TAI), mieux connu par nos collègues américains sous le nom de « Belgian Beast » (BB). Dans et autour de cette ville frontalière avec le Mexique, à l’extrême sud-ouest de l’État d’Arizona, nous trouvons les conditions idéales pour l’entraînement du SOR. Un ciel bleu et clair, une zone d’entraînement plus grande que les provinces du Limbourg et de Namur réunies et des conditions météorologiques dont nous ne pouvons que rêver en Belgique.

 

Toutefois, ce n’est pas pour profiter de ce paysage rude mais idyllique, qui semble tout droit sorti d’un western de Sergio Leone, que le SOR a parcouru des milliers de kilomètres vers l’ouest. « Le paysage désertique n’est qu’un des nombreux défis que l’environnement ici offre à nos militaires », déclare le lieutenant-colonel L’Evêque, chef d’état-major du régiment.

 

Belgian Beast trouve ses origines en 2014, quand le Special Forces Group trouvait ici les conditions idéales pour entraîner ses capacités (militaires) de chute libre. « En 2018, nous avons ajouté les capacités static line, c’est-à-dire l’ouverture automatique des parachutes, de nos para-commandos à cet exercice.  Avec la transition du C130 à l’A400M Atlas, nous profitons également de l’utilisation de ces appareils pour notre formation et la qualification tactique des pilotes ». C’est la première fois que deux de nos tout nouveaux avions de transport sont utilisés dans un exercice de cette ampleur.

 

Le choix de Yuma comme zone d’entraînement n’est pas une coïncidence. Les conditions géographiques et météorologiques offrent de nombreuses possibilités. « En Belgique, nous avons un espace aérien très dense et limité. Le SOR souhaite avoir des espaces ouverts, tant au sol que dans la troisième dimension, l’air. Le vaste environnement désertique de l’Arizona satisfait ces deux désirs. Bien sûr, nous ne sommes pas seuls sur ces terrains d’entraînement, nous devons donc l’utiliser au maximum nos possibilités ».

 

Cependant, cet environnement désertique unique présente également de nombreux défis. « Une fois que les troupes terrestres sont débarquées par insertion aérienne, la difficulté de s’orienter dans un environnement vaste, poussiéreux et parfois montagneux commence », poursuit L’Evêque. « Le fait de passer ou non la nuit dans un scénario tactique est un élément supplémentaire. La différence de température entre le jour et la nuit peut être assez importante ici. Cela exige des ajustements et de la flexibilité de la part de nos militaires ».

 

Le TAI/BB a également un caractère international. « En collaborant avec différentes nations, nous comparons nos techniques, tactiques et procédures respectives (TTPs) et pouvons apprendre les uns des autres. Les Special Forces françaises et les nôtres travaillent ensemble dans le domaine de la chute libre opérationnelle. Les Pays-Bas, quant à eux, coopèrent avec notre centre de formation de parachutistes à Schaffen. Surtout autour de l’approvisionnement en air ». Les Néerlandais utilisent un Joint Precision Air Drop System (JPAD), un coli guidé par GPS pour ravitailler les troupes isolées si nécessaire. Le Régiment utilise un système analogue, le High Altitude Air Drop System (HAADS), où le réapprovisionnement est effectué à l’aide de calculs et de coordonnées. Ainsi, un exercice comme le TAI/BB donne aux deux nations l’occasion de comparer ces deux techniques. La République tchèque a également coopéré avec le centre de formation au cours de chute libre (militaire), en envoyant deux participants à Yuma pendant l’exercice. « À l’intérieur des frontières de l’Europe, la République tchèque nous offre également un vaste espace aérien, de sorte que nous n’avons pas à traverser l’océan pour obtenir des conditions d’entraînement idéales en chute libre », a déclaré le lieutenant-colonel.

 

La région de la United States Marine Corps Base à 29 Palms, dans la partie la plus méridionale de la Californie, est le théâtre de l’exercice final (FINEX). C’est un exercice de synthèse où tous les éléments d’entraînement sont imbriqués, tant sur terre que dans les airs. « L’objectif de cet exercice est de mener un Non-combattant Evacuation Operation (NEO). Un scénario fictif dans lequel des expatriés belges sont emmenés hors d’une zone ennemie. Cela fait également partie des attributions du SOR ». Un tel exercice de synthèse nécessite une énorme coordination entre tous les éléments participant au TAI/BB.

 

« Nous parlons d’une insertion en chute libre à haute altitude des Special Forces, d’une insertion en static line des para-commandos, d’un déploiement de véhicules, d’une extraction de civils, d’autres ressources logistiques, de personnes blessées, ainsi que de personnel militaire. Lorsque ces éléments seront intégrés et que l’intégration complète avec l’A400M se sera avérée réussie et réalisable à la fin du trajet, alors je pourrai revenir sur cet exercice avec satisfaction ».

Rein Van den Bergh

Rein Van den Bergh, Gert-Jan D'Haene & Clint Soete